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Poème d’ici
Dans le givre le manteau est un mot


Par Ounsi el-Hajj
2014 - 03
Dans le givre le manteau est un mot 
Écris ta visite sur les saisons. Écris sur le pain et le vin ton baiser. Écris sur la surprise.
Écris.
Écris sur le feu et le laurier, ton désir, ton spectre, tes rêves.
Tu retourneras demain à ton maître.
à la joie de ton maître ?
À ton maître.
À la colère de ton maître ?
À ton maître !
À la merci de ton maître ?
À ton maître !…
Écris.
Écris ton illusion, ton passage sur les références et les fenêtres.
Tu n’es pas le printemps qui vient chaque printemps. 
Entre et écris. Écris les vocables de la mer et de la terre. 
Écris l’enthousiasme et la fatigue. La perdrix et la pierre. 
La douceur et la force. Écris l’acteur et le martyr. Le lit et la conscience. 
Livre-toi à ta main, laisse ta main se répandre sur les sources.
Tu meurs ô homme.
Écris !
Écris !
Écris !
Ton mécontentement de la neige, ta colère du cuivre, ton affection du soleil. Écris ton amour dans tous les yeux.
Que l’allumette soit un mot dans l’ombre, le manteau un mot dans le givre, la brise un mot dans la chaleur, et un mot l’éloignement et la rencontre, la bouche et le fleuve.
Que les hommes après toi dorment avec le mot.
Que les femmes après toi dorment avec le mot.
Et que le mot soit toi après toi.


Le clown 
1962
Ta voix est douce. Je dors dans ton isolement. Je te sens avec mes deux mains.
Tu m’invites au ruisseau ? Il faut que je revienne éclatant. 
Exquis comme la grêle.
Ton corps entraîne de la torpeur vacante. J’ai fui la superstition et l’exil et sur toi j’ai coulé les vagues. Passe : il n’y a personne dans l’esprit. 
Ton petit matin déborde et la mort est ajournée. Viens, sors moi de mon fourreau, je brille pour toi, 
Et deviens le visage du peuple.
L’amour ! La chouette enserrée dans le soleil
Les ruines aboyantes
Le saule coupeur 
Les yeux ignorés dans le cœur
La minute est lisse, maîtresse des offrandes, tu hurles avec l’une de tes prunelles. 
Y a-t-il un mensonge comme le mien ? Un roi comme mon roi ? Tel un son descendant, je résonne dans son tambour. Que reste-t-il ? J’ai évacué de ma bouche ta voix douce. Mon air demande l’hospitalité à l’amour, il traite les visages, unit les affluents noirs. Ma mémoire a inauguré son temps.
Un poulpe aplanit le voyage, résume les glandes, perd la parole 
Je te traîne vers mon époque odieuse.
Je te hais…

Traduits de l’arabe par Abdul Kader el-Janabi et Mona Huerta


Dialogue
- (…) Dis : à quoi penses-tu mon amour ?
- Je pense à comment j’étais, et je suis affligé pour toi, ô ma bien-aimée.
Je pense à mon soleil qui t’a liquéfiée, à ma patience qui 
T’as soumise, je pense à mon amour qui t’a pliée, puis s’est lassé de toi
Ô ma bien-aimée.
Je pense aux élégies, ô ma bien-aimée.
Je pense au meurtre.

Traduits de l’arabe par Dounia Abourachid
 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166