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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Par Toufic SAFIÉ
2008 - 12
Janitor, numéro 2 : Week-end à Davos de François Boucq (dessinateur) et Yves Sente (scénariste), Dargaud Benelux.


C’est comme si de nos jours, la créativité des artistes se faisait rattraper par la réalité du monde. Rares sont les scénaristes – même de science-fiction – qui avaient attaqué les tours jumelles de New York, avant les terroristes. Quelque part, ils auraient été certains d’échouer là où ces derniers ont réussi : tétaniser le public. Au moment où un autre symbole de richesse mondiale, à l’apparence inébranlable, est en train de s’écrouler à son tour, le rapport entre créativité et réalité resurgit de nouveau. Il est assez marquant en lisant le deuxième numéro de Janitor. Les pièces du puzzle éparpillées dans le premier numéro introductif viennent s’assembler dans Week-end à Davos pour raconter la première épreuve du curé bondien Vince, alias « Trias », 3e des 12 Janitors qui forment le corps de renseignement et de sécurité de l’Église dans le monde.

Chargé de la protection d’émissaires du Vatican au forum économique à Davos – où sont réunis les grands influents des marchés boursiers mondiaux –, sa mission prend aussitôt un tournant étonnant lorsqu’un peloton de l’armée suisse (différente de la garde…) vient interrompre le colloque pour annoncer une guerre nucléaire imminente. Ainsi, c’est en image que les Tycoons de la Bourse – et les évêques – observent des villes comme Téhéran et Bethléem brûler sur CNN, BBC et TV5.

Sceptique, comme tout héros bondien avisé le serait, Trias se faufile hors de l’hôtel, laissant des hommes (et une femme) d’affaires paniqués à convertir leurs fortunes et actions en valeurs sûres, sous l’œil davantage surveillant que bienveillant du peloton suisse. Commence alors une escalade d’action impliquant une poursuite de ski digne de L’espion qui m’aimait, explosion d’hélico et... duel d’épées entre curés sur les toits du Vatican. Tout cela pour contrer une conspiration, incroyable – ou simplement impossible – par son ingéniosité, impliquant de hauts dignitaires de l’Église, pour déstabiliser le marché boursier international. En observant cette vision d’artiste sur le monde financier, et l’invraisemblable conspiration qu’il faudrait pour le déstabiliser, Week-end à Davos nous permet de faire un petit flash-back à l’époque où personne ne se doutait encore qu’un tel système pouvait s’écrouler par le « simple » jeu des spéculations.

Le dénouement assez tranchant de l’album semble toutefois clore la question de la conspiration politico-boursière au sein de l’Église tout en prolongeant, par une apparition aussi mystique qu’astucieuse, les questions personnelles qui troublent toujours l’esprit du prêtre-héros, ouvrant la voie à de nouvelles intrigues. Le scénariste Yves Sante cherche peut-être à donner à sa série la vocation d’un thriller polyvalent dans le sens où chaque numéro serait orienté vers un domaine particulier de la « conspiration » internationale. Quel meilleur « browser » que le Vatican – déjà avéré comme choix de succès pour un Coppola et un Dan Brown, pour ne citer qu’eux – pour créer le cadre réaliste idéal d’une série d’actions où s’affrontent collusion perfide et héroïsme fervent ?

 
 
 
2020-04 / NUMÉRO 166