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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Poésie
Modernité de la poésie arabe


Par Ritta Baddoura
2007 - 04


À l’heure bleue, se détachent les poèmes de l’Anthologie publiée par Actes Sud Junior, de l’étendue de la poésie arabe contemporaine. Les vers rencontrant, dans le reflet de la page, leur visage traduit, en ont gardé la rosée colorée. La plume de Koraïchi, en ses lignes et ses signes, a remonté le cours des sources pour une nouvelle cartographie. Les poèmes sélectionnés par Farouk Mardam-Bey s’adressent avant tout aux jeunes d’aujourd’hui, en leur vent d’indépendance et leur désir impétueux ; puissent-ils trouver dans leur lecture le partage d’une condition humaine unifiée. Mardam-Bey, en addition aux notices biographiques et bibliographiques des poètes présentés, souligne le tournant pris par la poésie arabe suite à l’abandon progressif de la prosodie traditionnelle. Initié à Bagdad puis renforcé à Beyrouth dès le milieu du XXe siècle, ce mouvement indique plus qu’une révolution du langage, un affranchissement de l’imaginaire et un positionnement existentiel et citoyen. Poésie traversée par les landes de nos pays, la sélection de cette Anthologie raconte l’histoire et dit les revendications et la blessure humble.  « Révolte, déracinement, exil, identité, amour… la poésie arabe contemporaine est une parole de notre temps », lit-on sur la quatrième de couverture. Notre temps, écartelé par le politique tout-puissant, est bel et bien fait de deuils, suspendus ou éclatés.

Les vingt poètes de cette Anthologie – parmi lesquels trois Libanais : Abbas Beydoun, Ounsi el-Hage et Georges Schéhadé – sont des titans de la poésie arabe moderne. Certains écrivent en arabe, d’autres en français, belle reconnaissance pour ceux qui, tout en s’exprimant dans une langue étrangère,  « participent pleinement de l’imaginaire poétique de leur pays d’origine », comme le dit si bien Mardam-Bey. Une femme seulement figure parmi ces vingt poètes : l’Irakienne Nazik al-Malaïka, pionnière de l’écriture poétique arabe moderne, car la première à écrire en vers irréguliers. Ce fait soulève évidemment plus d’un questionnement. Car même dans la mesure où cette Anthologie ne prétend pas représenter l’ensemble du paysage poétique arabe contemporain dans sa  « diversité thématique et formelle », il reste qu’elle cherche à s’adresser  « aux hommes et aux femmes d’aujourd’hui ». Est-ce tout à fait possible lorsqu’elle exclut un grand nombre de femmes poètes, de la douceur de l’heure bleue ? 

La captivité, la perte puis la quête identitaire, l’amour pour la patrie, la solitude, le poids et le baume du silence sont les îlots de cette Anthologie, bien qu’explosent quelquefois des vagues de beauté jouissive, de liberté intérieure et sereine à l’encontre de tant de murs. Bien que la traduction s’avère inégale et perde, pour certains poèmes, de la subtilité du rythme et de la richesse du/des sens, il n’en demeure pas moins que présenter, à travers une édition bilingue, la poésie arabe aux juniors, est une remarquable initiative...

 
 
La captivité, la perte puis la quête identitaire, l’amour pour la patrie, la solitude, le poids et le baume du silence sont les îlots de cette Anthologie
 
BIBLIOGRAPHIE
Anthologie de poésie arabe contemporaine de Farouk Mardam-Bey, peintures de Rachid Koraïchi, édition bilingue, Actes Sud Junior, 2007, 96 p.
 
2020-04 / NUMÉRO 166