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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Essai
Saint-Exupéry sauvé des eaux !


Par Lamia el Saad
2008 - 05



Le 31 juillet 1944, à 8h45, le commandant Antoine de Saint-Exupéry décolle pour une mission cartographique à haute altitude dans la région de Grenoble-Annecy. Sans nouvelles de lui à 14h30, on le déclare disparu en mission.

Saint-Exupéry a-t-il été abattu par la chasse allemande ? Fut-il victime d’une panne de moteurs ou de ses instruments de navigation ? A-t-il commis une faute de pilotage ? A-t-il pris des risques inconsidérés ? S’est-il donné la mort ? Les rumeurs les plus fantaisistes ont couru à ce sujet. Certains ont même imaginé que l’auteur du Petit Prince avait organisé sa propre disparition et qu’un atterrissage clandestin quelque part dans le Jura ou en Suisse lui avait permis de se réfugier dans l’anonymat et le silence d’un monastère, loin de ce monde sur lequel il avait porté des jugements implacables…

Coécrit par Jacques Pradel et le scaphandrier Luc Vanrell, Saint-Exupéry l’ultime secret retrace les différentes étapes de plusieurs années d’enquêtes. Longtemps on a supposé que l’avion gisait quelque part dans la Baie des Anges, entre la Corse et le Continent. En 1998, un pêcheur marseillais, Jean-Claude Bianco, retrouve la gourmette de Saint-Exupéry. En 2003, l’épave de son avion est repêchée à quelques centaines de mètres de l’île de Riou, dans la région des calanques. Le lieu de sa mort étant désormais connu, il restait à en déterminer la cause.
Cette enquête sur la mort de l’auteur de Terre des hommes révèle, par ailleurs, de nombreuses informations sur sa vie comme, par exemple, son engagement obstiné dans la Résistance ; et aboutit à une révélation pour le moins inattendue.

Un pilote de guerre allemand affirme avoir abattu celui qu’il admirait et qui avait inspiré de nombreuses vocations d’aviateurs. Horst Rippert témoigne : « Le pilote, je ne l’ai pas vu, et quand bien même, il m’aurait été impossible de savoir que c’était Exupéry… Si j’avais su, je n’aurais pas tiré. Pas sur lui ! »

Bien entendu, la première réaction d’un lecteur avisé serait de se montrer sceptique… Cependant cet ouvrage est rédigé en grande partie d’un point de vue scientifique, avec une abondance de détails et de termes techniques propres à l’aviation qui plaident en faveur de la thèse adoptée. Ainsi, Saint-Exupéry serait mort pour la France, entre ciel et terre…

Toutefois, certains faits demeurent inexpliqués… Pourquoi s’est-il éclipsé à 23h30 la veille de sa mort ? On a appris plus tard qu’il n’était pas rentré à la base où il ne s’est présenté qu’au matin, pour sa mission. On n’a jamais su où il avait passé la nuit.

Et que dire de ces deux lettres qu’il a laissées en évidence sur la table de sa chambre d’officier et dans lesquelles il mentionne avec insistance l’éventualité de sa mort en raison des risques encourus ?

Saint-Exupéry ne se reconnaissait plus dans les valeurs de son temps et vivait en réalité un profond mal-être. Certes, il ne s’est pas suicidé, mais il était dans un état suicidaire : « Je suis un homme d’un autre âge. Je suis contemporain de Joachim du Bellay, ou à la rigueur d’Arvers avec son sonnet, son mystère et son secret. La civilisation aurait dû s’arrêter là… Quand nous aurons délivré la France, il n’y aura plus qu’une chose à faire : passer au marteau-pilon tout ce qu’a fabriqué notre progrès imbécile et… remettre l’esprit à sa vraie place. Si on ne le fait pas, l’humanité s’ensevelira de ses propres mains. »

 
 
 
BIBLIOGRAPHIE
Saint-Exupéry l’ultime secret de Jacques Pradel et Luc Vanrell, édition Du Rocher, 189 p.
 
2020-04 / NUMÉRO 166