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Essai
Napoléon III sous l’empire des sens
À l’occasion du bicentenaire de la naissance de Napoléon III, de nombreux ouvrages lui sont consacrés. L’un des plus étonnants est sans doute celui de Michel de Decker, qui dévoile le côté libertin de cet empereur insatiable.

Par Lamia EL-SAAD
2008 - 04



Une fois n’est pas coutume ! Napoléon III ou l’Empire des sens de Michel de Decker, pour être une œuvre d’histoire avec un grand H, n’en est pas moins un livre qui retrace la vie amoureuse de Napoléon III qui fut un grand séducteur et un libertin. L’auteur nous décrit par la même occasion une société qui baigne dans le libertinage et où les bâtards tiennent presque le haut du pavé.

S’il est bien téméraire de prétendre établir une liste exhaustive de toutes celles qui succombèrent au charme de ses yeux voilés, il est en revanche établi que l’empereur avait cinq ou six garçonnières dans Paris où de nombreuses dames venaient se faire donner l’obole impériale. Ni le Vert-Galant ni même Louis XV dit le Bien-Aimé de ces dames ne peuvent rivaliser avec lui. Qu’elles soient ancillaires, demi-mondaines, bourgeoises ou cousinales, ses amours ne l’empêchèrent pourtant pas de se révéler un époux jaloux prenant ombrage des infidélités d’Eugénie de Montijo. Généreux envers ses maîtresses, « il traitait l’amour avec les mêmes contradictions que la politique, tantôt à la façon d’un barde, tantôt en soldat aux volontés impatientes réclamant une satisfaction immédiate ».    Le père du légitime Louis fera trois bâtards, dont un à la fille du baron Haussmann. L’impératrice Eugénie le quittera deux fois, mais reviendra résignée.

Jeune prince en exil, il sera condamné à la suite des deux tentatives de coups d’État de Strasbourg et de Boulogne à l’emprisonnement perpétuel dans la forteresse de Ham. Il y fera deux bâtards à sa lingère avant de s’évader pour se rendre à Londres et y attendre son heure et le déclin du règne de Louis-Philippe.

Élu président en 1848, il est plébiscité empereur le 2 décembre. Après la bataille de Solferino, il signe avec l’Autriche une paix qui ne satisfait pas l’Italie, mais obtient le rattachement à la France des provinces niçoises et savoyardes. Si l’histoire a retenu de son règne la défaite de Sedan, elle a en revanche occulté son érudition et ses écrits (Des idées napoléoniennes et Extinction du paupérisme) ; et dans sa vie privée son penchant prononcé pour la cigarette alors que ses contemporains fumaient encore la pipe, son affection pour les fauteuils crapauds et les canapés capitonnés de velours, boutonnés et agrémentés de longues franges typiques de ce que l’on appelle « le style Napoléon III ».

Il sera à l’origine de deux Expositions universelles. Il fera de Paris, grâce aux travaux urbanistiques du baron Haussmann et à ses belles avenues, une ville napoléonienne par excellence et lui donnera son aspect actuel. Sous son règne, Paris devient la plus belle place financière du monde ; la France s’enrichit. Le commerce extérieur double et l’Empire colonial français rivalise avec celui de la reine Victoria. Ni lui ni De Lesseps ne seront étrangers au percement du canal de Suez que l’impératrice Eugénie ira inaugurer.

Socialiste avant la lettre, il a tout au long de sa vie travaillé pour le progrès social en développant l’habitat salubre à petits prix, en ouvrant des asiles pour les ouvriers âgés ou malades, en créant des sociétés philanthropiques, des caisses de secours mutuel et en accordant le droit de grève. Il a, en outre, rendu le Panthéon au culte catholique, offert de bonnes conditions de vie au clergé séculier, favorisé la construction de nombreuses églises et passé sa vie d’empereur à protéger les États du pape. Homme de paix et humaniste, il a enfin soutenu la création de la Croix-Rouge et tenté par tous les moyens d’éviter les affrontements militaires…
Ainsi, sous couvert de nous raconter les secrets d’alcôves qui font la petite histoire, Michel de Decker réussit-il tout de même à brosser un portrait complet de cet empereur français qui repose toujours… en Angleterre !



* À noter aussi la parution de l’excellente biographie de Napoléon III, par Éric Anceau, chez Tallandier, et Napoléon III, actes et paroles d’Alain Carteret aux éditions de La Table ronde.
 
 
D.R.
Il est établi que l'empereur avait cinq ou six garçonnières où de nombreuses dames venaient se faire donner l'obole impériale
 
2020-04 / NUMÉRO 166