Parce que notre enfance marque à jamais notre vie et forge notre personnalité, Roland Pirard commence par s’attarder sur les penchants d’un jeune orphelin pour la musique, le chant et la peinture, puis expose tout ce qui a contribué à faire du jeune Adolf Hitler le chef sanguinaire que l’on connaît : l’origine de son antisémitisme et de son hostilité envers les Slaves et les homosexuels, ses lectures qui lui font découvrir la théorie de Darwin sur la sélection naturelle… Durant la Première Guerre mondiale, il se distingue par son courage, échappe plusieurs fois à la mort et reçoit deux décorations. Il vit la défaite comme une humiliation. Pour la première fois depuis la mort de sa mère, il pleure… Et décide de s’engager dans la politique. Pirard retrace avec précision l’irrésistible ascension d’Hitler vers le pouvoir, accordant de l’importance à chaque étape puisque le Führer joue habilement et patiemment sa partie d’échecs pour le pouvoir.
Excellent orateur, il cultive le culte de sa personne ; et la naissance de l’hitlérisme contribue à faire du NSDAP (Parti national-socialiste des travailleurs allemands) un véritable État dans l’État. En 1933, il devient chef du gouvernement allemand et entreprend, à 43 ans, de consolider son pouvoir. Le 23 mars 1933, il fait voter la loi qui lui donne les pleins pouvoirs et qui est à la base des pouvoirs dictatoriaux du chancelier Hitler et de son gouvernement. À la mort du président Von Hindenburg en 1934, il fait adopter par son gouvernement une loi qui réunit en sa personne les fonctions de président et de chancelier. Si les principaux courants religieux en Allemagne (protestant et catholique) sont hostiles au communisme athée, ils n’étaient pas pour autant favorables au national-socialisme. Hitler les maintiendra donc sous une pression constante.

Au fil des pages, Pirard nous guide de manière experte à travers les méandres de la politique étrangère du IIIe Reich et égrène, bataille après bataille, front après front, le déroulement de la Seconde Guerre mondiale. Il aborde évidemment les déportations et l’Holocauste, puis développe un aspect longtemps négligé de la politique du IIIe Reich : sa politique sociale, économique et monétaire. Cet aspect est d’autant plus délicat que Hitler rejeta le marxisme, le communisme et le capitalisme et opta pour un dirigisme économique qui s’avéra, à bien des égards, efficace. Loin des sentiers battus, l’auteur passe au crible la doctrine meurtrière d’Hitler et étudie la place du phénomène national-socialiste dans la société allemande et son expansion guerrière à toute l’Europe.

Il était sans doute très délicat d’aborder un sujet déjà magistralement traité par John Toland dont la biographie Adolf Hitler peut être considérée comme le livre « définitif » sur le personnage. L’analyse approfondie de Roland Pirard, notamment dans les domaines économique et social, jusque-là méconnus, offre néanmoins d’intéressantes perspectives et éclaire l’histoire d’un jour nouveau.