Par Alexandre Najjar
2010 - 04
De retour de Stockholm, j’observe le Liban avec consternation. Qu’avons-nous fait de notre pays ? Pourquoi, là -bas, une nation de 9 millions d’habitants est devenue un modèle pour le monde, tandis que, chez nous, 4 millions de Libanais sont incapables de construire un État ? À qui la faute ? Au confessionnalisme, aux ingérences étrangères ? Sans doute, mais aussi au règne des mafias. Notre pays est, hélas, l’otage de mafias qui, pendant et après la guerre, ont créé leur propre mode de régulation, « la gouvernance par la délinquance » pour reprendre la formule de Jean de Maillard, auteur d’un essai intitulé L’Arnaque, la finance au-dessus des lois et des règles (Gallimard), et, de connivence, ont dépecé le Liban. Depuis 2005, notre pays est privé de budget. La raison en est simple : sans budget, on vole mieux. Les dépenses de l’État ont ainsi augmenté de 50% et les aides internationales se sont évaporées. La corruption gangrène les institutions ; deux ou trois ministères, considérés comme des « vaches à lait », sont monopolisés par certains partis, alors que le Hezbollah prospère et régente tranquillement son fief hors de tout contrôle.
Dans ces conditions, le fossé s’est creusé entre l’État et le peuple. La société libanaise est à l’abandon, n’intéresse pas nos députés qui, à quelques exceptions près, n’ont aucune notion de l’intérêt public. Tout bien considéré, le Liban ressemble moins à la Suède d’Olof Palme qu’au Chicago d’Al Capone !