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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Bande dessinée
Jean Van Hamme, père de Thorgal, Largo Winch et XIII


Par Ralph Doumit
2016 - 11
1976. Un jeune cadre dynamique de Philips, directeur des appareils ménagers, se voit proposer une promotion dans la filiale du groupe au Mexique. L’avenir semble sourire à ce diplômé en ingénierie commerciale, agrégé d’économie politique et grand routard à ses heures. Pourtant, non seulement notre homme refuse, mais il donne sa démission. Sa décision est motivée : il veut consacrer son temps à l’écriture qui occupe ses moments libres depuis plusieurs années. Cet homme est Jean Van Hamme.

Quelques années plus tôt, il fait preuve d’une confiance audacieuse qui l’accompagnera sa carrière durant. Encore inconnu au bataillon du neuvième art, il propose à Paul Cuvelier, auteur mythique de la série Corentin, se rêvant peintre reconnu et en mal d’inspiration pour ses bandes dessinées, de lui écrire ses scénarios. Ce sera Epoxy, fable mythologique, puis deux scénarios pour Corentin. Jean Van Hamme entre en bande dessinée par la grande porte, et n’en sortira plus. La suite on la connait : des coulisses de la finance dans Largo Winch à la mythologie nordique de Thorgal, en passant par l’espionnage-politique de XIII, Jean Van Hamme scénarise des séries au long cours, qui remportent un succès phénoménal.

Il n’en faut pas plus pour imaginer que tout ce qu’il touche se transforme en or, et pourtant, la lecture de ses Mémoires d’écriture, dans lesquelles il retrace son parcours avec une lucidité amusée, nous rappelle que la route fut parsemée de déceptions. Celui qui commença par reprendre les scénarios de séries en perdition connut comme beaucoup d’aspirants auteurs les déconvenues des sorties qui font flop et des promesses légères jamais tenues. Puis, de scénarios de BD en scénarios de films, vint le succès qui, comme chacun le sait, n’a pas de recette. Mais il est des qualités qui mettent dans de bonnes dispositions.

Jean Van Hamme a le sens du plaisir, tant de la lecture que de l’écriture. La sienne est complexe, maligne, mais n’oublie jamais le lecteur en chemin, en jouant sans cesse de l’art de la surprise et de la tenue en haleine. Au service de ce plaisir, des dessinateurs réalistes d’exception. Si Vance, aux commandes de XIII, avait déjà fait ses preuves, d'autres ont véritablement éclos dans leur collaboration avec Jean Van Hamme. On pense à Phillipe Francq, héritier d'Hermann, qui se plia, d'abord avec appréhension puis avec une maestria rare, aux décors urbains de Largo Winch. Ou Grzegorz Rosinski qui développa dans Thorgal un dessin à l’encrage riche et organique avant de basculer avec classe dans un style peint en couleur directe.

À l’heure où Jean Van Hamme fait un pas en retrait (il a abandonné le scénario de ses principales séries), à l’heure où d’autres reprennent le destin de ses personnages, à l’heure où il entend consacrer son temps aux voyages et son énergie, peut-être, à l’écriture théâtrale, n’est-ce pas le moment idéal pour rencontrer cet auteur qui, des décennies durant, marqua de son empreinte le monde de la bande dessinée ?


BIBLIOGRAPHIE
 
Mémoires d’écriture de Jean Van Hamme, éditions Bamboo, 2016, 112 p.

Jean Van Hamme au Salon
Table ronde « Finance et BD » le 12 novembre à 16h (Amphi Gibran)/ Séance de dédicace à 17h (Stéphan)
 
 
D.R.
 
2020-04 / NUMÉRO 166