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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Le livre de chevet de...
2014-12-04
Dans la petite bibliothèque que je porte en moi, il y a tous les livres que j’ai lus, aimés, rêvés et même oubliés. Mais il y a aussi, en très petit nombre, les textes que j’ai relus infiniment, sans parvenir ni à m’en détacher ni à en épuiser le sens. Par exemple, ce bref récit de deux pages, à l’avant-dernier chapitre du Procès de Kafka. C’est l’histoire d’un homme qui se présente devant la porte de la Loi. Il y perçoit une «?lueur?» et demande à entrer. Le gardien lui tend un tabouret et le prie d’attendre. Des jours passent, puis des années. Un soir, sentant la mort venir, l’homme se penche vers le vieux gardien et lui demande?: «?Comment se fait-il que personne d’autre que moi ne s’est présenté devant cette porte???» Le gardien lui dit alors?: «?Ici, nul autre que toi ne pouvait pénétrer, car cette entrée n’était faite que pour toi.?»

La parabole a suscité des milliers de commentaires philosophiques ou mystiques. Est-ce sur le seuil de la maison de Dieu ou du Savoir que nous nous tenons perpétuellement?? Il y a cependant une autre interprétation possible?: dans la tradition religieuse de Kafka, la loi, c’est d’abord le Livre.

Peut-être cette histoire raconte-t-elle notre rapport aux livres?: pourquoi lisons-nous si ce n’est parce nous entrevoyons dans les livres une lueur, un chant qui nous attire inexplicablement, qui nous ravit ou nous console. Nous n’y entrons pas, bien sûr, nous restons dehors. Mais nous savons que chacun des livres qui nous touche profondément n’a été écrit que pour nous.
 
 
© D.R.
 
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