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2020-04 / NUMÉRO 166   RÉAGISSEZ / ÉCRIVEZ-NOUS
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Entretien
Katherine Pancol : « Je suis incapable de me défaire de mes héros. »


Par Laurent Borderie
2018 - 11
En livrant le septième volume d’une série entamée avec Les Yeux jaunes du crocodile, Katherine Pancol poursuit une saga qui réjouit toujours autant de lecteurs et lectrices. Sept volumes plus tard, plus de 50 personnages ont été créés, des situations romanesques ont transporté des millions de lecteurs à travers le monde. L’écrivain mêle les histoires, tricote des parentés, crée des intrigues qui tiennent en haleine le lecteur. Animée par une profonde culture littéraire dont elle use dans chaque roman, Katherine Pancol rend dans Trois Baisers un vibrant hommage à Victor Hugo. 

C’est une femme en pleine promotion de son dernier roman qui nous a répondu avec bonheur, celui, certainement, de pouvoir repousser la mort avec chacun de ses romans. 

On se souvient qu’après Les Écureuils de Central Park s’ennuient le lundi, puis le troisième tome de Muchachas, vous annonciez en finir avec cette épopée qui tourne autour de Joséphine Cortès et vous revoilà, trois ans plus tard, de retour avec les mêmes héros. Vous ne pouvez plus vous en passer ?
Il y a plusieurs facteurs qui me poussent à poursuivre cette épopée commencée il y a plus de 10 ans. J’ai toujours envie d’en finir avec mes héros, mais je suis incapable de m’en défaire vraiment. Et puis il y a les lecteurs qui souhaitent que je poursuive cette saga. Je n’aurais jamais pensé, lorsque j’ai commencé cette série, qu’elle pourrait devenir un tel étendard pour les lecteurs. Lorsque Le Crocodile a été publié en Chine, j’ai reçu un courriel d’un jeune militaire chinois de 20 ans qui m’a écrit « Joséphine c’est moi ». Il m’a dit que comme elle, il était terrorisé par le monde, qu’il se sentait lâche, moche, incapable de réaliser ses rêves et que si Joséphine pouvait évoluer, il le pourrait lui aussi. J’ai vécu cette forme de proximité avec les héros des romans que je lis depuis mon enfance. J’ai pleuré avec Anna Karénine, Colette m’a ouvert de nouveaux horizons. Le pouvoir de la littérature est extraordinaire et avoir initié de tels sentiments chez mes lecteurs est une joie.
On vous imagine parisienne, urbaine et vous décrivez le monde agricole, celui de la ferraille avec vérité. Comment procédez-vous ?
Je suis journaliste, je me renseigne, j’enquête, je bouge, je vais voir, je m’installe dans mes décors. Il nous faut des détails pour pénétrer les univers que nous décrivons. Je me suis rendue compte que depuis Muchachas le monde a incroyablement changé. Cela s’est produit en tellement peu de temps que ce phénomène interroge nécessairement sur le déroulement de notre vie.

C’est comme cela que l’on écrit « la comédie humaine » aussi, en poursuivant une saga, en créant de nouveaux personnages ?
C’est possible, mais c’est aussi une comparaison qui peut écraser. J’écris le monde, je me nourris de voyages, mes personnages évoluent avec moi, je leur donne chair, j’en invente d’autres, j’en fais disparaître. J’aime la puissance du roman qui permet de créer des choses, des moments, des personnages insensés. 

Vous pourriez être définie comme une romancière du bonheur, capable d’en procurer à vos lecteurs.
Ah, le bonheur ! il n’est pas à la mode aujourd’hui. On aime tellement parler de soi et de ses petits malheurs. Je trouve qu’il est plus intéressant, plus jouissif de créer des dizaines de personnages. De leur inventer des vies. Je fais des fiches que j’alimente d’un livre à l’autre, je crée des filiations, j’invente des amis, des situations cocasses. Pour moi, c’est une idée du bonheur d’évoluer dans ce monde de création. Les livres nous font vivre des histoires, des destins fabuleux et permettent de repousser la mort. Repoussons-la encore. Lisons et écrivons des histoires.



BIBLIOGRAPHIE
Trois Baisers de Katherine Pancol, Albin Michel, 2017, 850 p.


Katherine Pancol au Salon :
Débat « Dans l’écriture, peut-on tout se permettre ? », le 4 novembre à 19h (Agora)/ Signature à 20h (Orientale)/ Grand entretien avec Georgia Makhlouf, le 6 novembre à 17h30 (salle 1- Antoine Sfeir )/ Signature à 18h30 (Orientale).
 
 
© Loïc Venance / AFP
 
2020-04 / NUMÉRO 166